Mobilité

            En arts martiaux la mobilité peut être définie comme la capacité à se déplacer au cours d’un combat dans un espace en trois dimensions. Et, le Judo, est l’un des arts martiaux moderne qui exploite le mieux ce travail, à condition de l’exécuter correctement.

            Se déplacer dans un espace en trois dimensions revient à appréhender l’espace, et ce qui nous entoure, librement. L’objectif étant d’effectuer des mouvements qui ne sont, dans un sens,  jamais linéaires.

            Pour saisir la notion de travail en trois dimensions prenons l’exemple de la marche. Lorsque je me déplace, mes hanches restent parallèle au sol, linéaire, Il n’y a qu’un seul axe (ou direction) de déplacement, je suis donc dans un travail en deux dimensions (comme si l’on traçait un trait sur une feuille). Par contre, si je cours et qu’à l’instant T je saute en avant et vers la droite, mon axe de déplacement sera non seulement vers l’avant mais aussi vers le haut puis le bas tout en étant vers la droite. À l’instant où mes pieds quittent le sol, j’entre alors dans un déplacement en trois dimensions.

            En Judo il existe de nombreuses projections, notamment les formes anciennes, où il est nécessaire de travailler en trois dimensions si l’on souhaite être efficace. C’est ce que l’on considère parfois, à tort, le travail en cercle. En effet, d’un point de vue compréhension et application, il serait plus judicieux de parler d’un travail en spirale ascendante ou descendante (comme pour Harai Goshi). C’est le même principe que pour le Hakei où la technique est plus efficace si l’on effectue en plus une action vers le haut ou vers le bas.

            Pour faire simple prenons une technique comme O Soto Gari (sans prendre en compte l’action simultanée des mains). Au moment où je déplace mon pied gauche sur le côté de l’adversaire, je dois plier le genou afin d’utiliser l’effet ressort de la jambe lors du fauchage. Puis, en même temps que l’action de fauchage, mon corps (hanches et épaules) effectue une vrille vers la gauche pour accentuer la technique. On a la même action en spirale descendante/ascendante pour des techniques comme Uki Goshi, Harai Goshi… ou lorsque que l’on « glisse » sous l’adversaire.

            Dans la forme ancienne de O Goshi, si vous voulez réussir une projection sur les cervicales, vous êtes obligé d’effectuer un travail en trois dimensions. Si la technique est juste linéaire soit l’adversaire chutera sur le côté soit, au mieux, il tombera sur le ventre en limitant le contrôle que l’on peut avoir sur celui-ci.

            On dit généralement aussi qu’un bon déplacement conduit à la Mobilité car celle-ci est due au mouvement du corps, mais en aucun cas grâce à la vitesse ou à la vivacité. C’est le corps, dans son action, qui permet de bouger dans un espace en trois dimensions. Pour cela le corps (la hanche) doit partir en avant en se faisant suivre par les pieds. Sur la mobilité Igor Coréa (9e Dan de Judo) disait : « Dès qu’on est mobilisé on peut faire ce qu’on veut, on est ni en équilibre ni en déséquilibre, on est en équilibre instable » ou encore « Il faut s’entraîner à sa mobilité plutôt qu’à déséquilibrer l’adversaire ». Ce qui nous amènera après au déséquilibre : La véritable action du déséquilibre (Kuzushi en japonais) réside dans le fait, non pas de mettre l’adversaire en déséquilibre, mais de faire en sorte que l’adversaire se retrouve en déséquilibre. Et ceci est permis grâce à cette mobilité, créée par le corps ; c'est-à-dire la poussée avec le Hara (le ventre). Tout en sachant qu’un adversaire en situation de déséquilibre sera plus vulnérable à nos attaques (projections, clés, frappes…), tout en étant moins performant dans les siennes.